Après deux ans de gestation, la stratégie numérique du groupe La Poste qui avait déjà du plomb dans l’aile est difficile à déchiffrer. L’annonce d’un nouveau changement de cap en plein milieu d’un plan stratégique déjà bancal démontre les errements d’une direction et le désintérêt du gouvernement pour le service public postal.Cette présentation au lendemain de l’émission Cash Investigation qui dénonçait la vente de données et du nouveau service FACILEO en est le parfait exemple, surtout qu’elle annonce un renforcement de l’exploitation des données clients.
Même si on peut trouver quelques points positifs aux annonces notamment la mise à disposition du WI-FI gratuit dans les bureaux, que SUD PTT réclame depuis plusieurs années, d’autres annonces sont plus inquiétantes pour le personnel et les usagers.
La direction annonce en effet à la fois le maintien du nombre de point de contact mais aussi leur digitalisation, en affirmant même que les facteurs/trices pourraient devenir des points de contact ambulants. Cela sonne le glas, encore, de nombreux bureaux de poste et du métier de facteurs/trices et de postier-es en général. Mieux encore, La Poste semble se réjouir qu’un usager puissent à terme géolocaliser son facteur qui porte un colis.
La Poste réagit au phénomène d’uberisation qui ne fait que grandir. Si cela correspond à une réalité, qu’une entreprise de service public en fasse l’alpha et l’omega de sa stratégie est inquiétant. Inquiétant pour le personnel, inquiétant pour le service public postal.
Mais cela n’est pas étonnant quand on voit son attitude sur les « nouveaux services » qui devaient pallier une chute soi-disant stratosphérique des volumes du courrier. Pour la direction, comme elle l’a affirmé à SUD PTT, il s’agit de tenter des expériences locales pour rechercher de la valeur ajoutée au métier de facteur. Résultat, en quelques semaines, plusieurs de ces nouveaux services ont été abandonnés comme la livraison du pain, le promeneur canin, faute de « rentabilité », ou le postier expert en assurance, pure annonce fantaisiste dans une stratégie de communication.
Cela ne prêterait pas à conséquence si les directions postales n’en profitaient pas pour supprimer des emplois, bouleverser la vie professionnelle et personnelle de dizaines de milliers de postiers et de dégrader les conditions de travail des postier-es et la qualité de service public rendu aux usager-es. Pour SUD au regard du malaise grandissant dans les services, nous craignons pour la santé du personnel. D’ores et déjà des suicides et tentatives de suicide nous ont été signalés.
Pourtant, face à cela partout en France des postier-es rentrent en résistance ; des usager-es et des élu-es se battent contre la fermeture de bureau. L’heure est à un grand débat sur le service public postal aujourd’hui. Il ne s’agit plus de jouer aux apprentis sorciers. Ce débat ne doit pas résulter des réflexions de nos dirigeant-es mais bien de celles des salarié-es, usager-es, élu-es et État.